mardi 28 mars 2023

La résistance à Montpellier : un complément d’un lecteur

Nous avons diffusé en novembre 2019 la biographie du commissaire colonel Félicien Roussel rédigée par le commissaire général (2S) François Aubry. Cet article décrivait les circonstances dans lesquelles cet intendant de l’air (son titre durant la guerre), alors Intendant des bases de l’air à Montpellier, avait soutenu un mouvement de résistance local, auquel appartenaient également des personnels de son service.

« Le 8 octobre 1943, à la suite d’une enquête de la Gestapo, ses adjoints l'adjudant Popouneau (qui sera fusillé à Lyon le 21 février 1944) et l'adjudant-chef Weirich (qui sera déporté) et deux auxiliaires féminines (relâchées après 70 jours de détention) sont arrêtés. Lui-même, en mission, passe au travers du coup de filet. Resté à son poste, il est arrêté par la police allemande à Moissac le 11 août 1944, mais relâché par manque de preuves. »

L’auteur d’un livre sur ces évènements, Benoit Colin,  « D’un engagement à un autre - Pierre Colin, officier de l’Armée de l’air et chef de l’Armée Secrète - Montpellier, 1940-1944», paru en ce début d’année, nous a transmis des informations complémentaires sur l’intendant de l’air et sur les deux sous-officiers précités, que nous publions avec son accord.

(Extraits concernant le commissaire Roussel)

Page 34 : (début 1941)

Pendant ce temps, l’Armée de l’air poursuit sa grande réorganisation consécutive aux évènements de l’an passé. Ainsi est créé à Montpellier le 1er janvier 1941, un service de l’intendance de l’air. Ce service, implanté au numéro 1 de la rue des Trésoriers de France, à deux pas de la place de la Comédie, est chargé du versement des soldes et de pourvoir à l’habillement des hommes de l’Armée de l’air de la région. Le chef de service, le commissaire Félicien ROUSSEL a le droit d’être inquiet car la loi du 17 juillet 1940 interdit l’accès à la fonction publique, à ceux qui ne possèdent pas la nationalité française « à titre originaire, comme étant nés de père français ». Or son père est né au Luxembourg. Ses chefs interviennent auprès du Secrétaire d'État à l'aviation, à Vichy, pour défendre son dossier de « demande de relève d'interdiction d'accession aux fonctions publiques ». L’issue ayant été favorable, il est admis, seulement le 7 septembre 1942, dans le corps des commissaires de l’air. Autour de lui, quelques de sous-officiers l’aident dans les missions d’intendance. L’adjudant POPOUNEAU, comptable expérimenté, est nommé chef du service des fonds, poste pour lequel il faut un homme de confiance.

Page 75 : (Après le 8 novembre 1942 à Montpellier)

D’autres actions sont menées par des hommes qui n’acceptent pas cette occupation. Ainsi à l’intendance de l’Air, le commissaire ROUSSEL et son adjoint l’Adjudant-chef Nicolas WEIRICH, arrivé au service début décembre 1942, organisent la fuite de tous les matériels corps de troupe disponibles pour qu’ils ne tombent pas aux mains des Allemands. Des centaines de chaussures et vêtements sont ainsi soustraits au pillage éventuel de l’ennemi et cachés dans les usines des établissements PAULHAN & Fils. Pierre PAULHAN, 37 ans, dirige avec ses frères l’entreprise familiale de confection militaire du même nom, qui dispose de trois usines à Lasalle, Durfort et Monoblet, non loin de Saint-Hippolyte-du-Fort dans le Gard. Des armes et un peu de carburant suivent le même chemin vers les caches clandestines.

Page 81 : (année 1943, le S.T.O., les maquis)


Maquis Bir-Hakeim
Les maquis ont besoin de tout. Mettre des hommes à l’abri dans des régions reculés, loin des Allemands, est une bonne idée, mais il faut les nourrir, les habiller, et leur fournir des carburants. Le service de l’intendance de l’air, qui n’a plus grand-chose à faire en ce début d’année 1943, en raison de la démobilisation complète de l’Armée de l’air, est en mesure d’apporter son aide. Dès février 1943, l’intendant de l’air (et futur commissaire) Félicien ROUSSEL, en parfaite coordination avec Raymond CHAULIAC, le chef régional de l’Armée Secrète, livre au groupe « Bir-Hakeim » du maquis de l’Aigoual, des vêtements, carburants, équipements et armes qu’il avait caché en novembre de l’année précédente. Les camions de l’entreprise PAULHAN sont utilisés pour livrer les vêtements qui avaient été soustraits aux Allemands en novembre 1942, permettant d’équiper plusieurs milliers de maquisards, non sans devoir jouer au chat et à la souris avec les Allemands qui les surveillent de près.

Page 127 : (7 octobre 1943)

Adj Popouneau
A peine la porte franchie, la police allemande, qui les avaient suivis, fait irruption dans les locaux et arrête tout le personnel de ce service. Se trouvent là l’Adjudant POPOUNEAU, ses deux secrétaires, dont mademoiselle PASCAL , celle qui accompagnait JACQUEMIN, et Lilly LOZES, mais aussi l’Adjudant-chef Nicolas WEIRICH. Par chance le patron du service, le commissaire Félicien ROUSSEL est absent. Moins chanceux, Marcel GALOT est dans les locaux de l’intendance, cueilli avec les autres, alors qu’il n’est pas particulièrement ciblé ce jour-là.

Page 197 : (Epilogue)

Félicien Roussel : arrêté à Moissac le 11 août 1944 mais relâché faute de preuves. Il poursuit sa carrière à l’intendance de l’air – devenu commissariat de l’air - jusqu’à sa retraite en 1950. Décédé en décembre 1964 à Saint-Quentin-sur-Sauxillanges.

Notre texte de 2019 relatif à l’adjudant Popouneau a également été complété (.source : dossier de résistant GR16P 486148)