samedi 17 février 2018

Commissaire de l’air et pilote amateur

Yves Ferrié (ECA76)

Beaucoup d’élèves commissaires de l’air ont débuté leur pilotage à Salon puis ont continué à voler, bien sûr en passager sur les aéronefs de l’Armée de l’Air mais aussi comme pilotes en aéroclub*. Yves Ferrié est l’un d’eux, totalisant aujourd’hui 850 h de vol.

Mon goût pour l'aviation et l'espace remonte à ma prime jeunesse, vécue  dans une décennie prodigieuse en exploits aérospatiaux : Concorde, Gagarine, Gemini, missions lunaires Apollo.
Après des études de droit et science politique, "Que faire?" (sans paraphraser Lénine!).  Trop actif pour me contenter d'une carrière purement administrative mais pas assez doué en matière scientifique pour envisager un métier d'ingénieur aéronautique ou de navigant professionnel, c'est tout naturellement que j'ai passé en 1976 le concours du commissariat (air - marine à l'époque).



L'Ecole du commissariat de l'air m'a offert la possibilité de m'initier au vol moteur qui faisait partie intégrante de la formation de tous les élèves officiers quelle que soit leur spécialité. Il faut rappeler que le mérite en revient au commissaire général Bouillaud, alors qu'il était directeur de l'école quelques années auparavant et avait su convaincre le commandement de l'Ecole de l'Air d'étendre aux élèves commissaires la pratique des sports aériens.

C'est donc sur le Jodel  D-140 Mousquetaire - un avion relativement puissant à train classique - que j'ai entamé au GALEA** cette initiation tous les lundis matin dans le ciel de Provence. Le premier vol en solo intervenait au bout d'une quinzaine d'heures  et constituait un moment fort dans la vie aéronautique des élèves après les sauts en parachute.

Cet avion est aussi  associé à un souvenir douloureux, celui de l'accident tragique survenu à 3 commissaires de la promotion 1983 dans les Alpes de Haute Provence. Les ayant bien connus alors qu'ils préparaient intensément  le concours, je salue ici leur mémoire.

Devenu par la suite commissaire de base à Saintes, j'ai eu l'opportunité de goûter aux joies du vol à voile au sein de la section dédiée à l'instruction des apprentis mécaniciens.

Au dessus des Corbières
Plus tard, affecté comme  secrétaire général de l'Ecole Nationale Supérieure de l'Aéronautique et de l'Espace, j'avais, entre autres attributions, la responsabilité de superviser le fonctionnement de l'aéroclub doté de 12 appareils.  Cet organisme était notamment chargé d'assurer l'initiation au vol des élèves ingénieurs avec des travaux pratiques assez pointus sur la mécanique du vol et l'aérodynamique. Là encore, j'en ai profité pour approfondir mon expérience avec des enseignants et des instructeurs "de haut vol".

Après avoir exercé les fonctions de chef du soutien personnel de la base aérienne 118 de Mont de Marsan, j'ai quitté le service actif non sans  avoir insisté lourdement pour bénéficier d'un vol en place arrière d'un Mirage 2000, lequel vol pourtant "pépère" aurait pu me rendre malade au bout de cinq minutes si je n'avais pas demandé au pilote de réduire le taux de ses virages***.

Peyresourde
Aujourd'hui en retraite, je poursuis toujours mes activités au sein d'un aéroclub de la Défense à Toulouse et je compte le faire tant  que le grand âge et la maladie ne m'auront pas rattrapé. Qu'est ce j'y trouve ?

-une école de rigueur, de prudence  et de modestie car la surestimation de soi et l'excès de confiance peuvent se payer au prix fort;

-alors que je commence à semer mes neurones comme le petit poucet ses cailloux, le maintien des compétences aéronautiques exige une curiosité et un investissement intellectuels pour utiliser des applications numériques de préparation des vols toujours plus nombreuses et complexes (Mach 7, Sky dream VFR, Windy, etc.) dont les performances étaient inimaginables il y a dix ans;

Vers la dune du Pyla
- enfin, moi qui n'ai pas goûté au  haschisch mais seulement aux herbes de Provence, j'apprécie, de temps en temps, le  sursaut d'adrénaline que procure le survol du Pic du Midi  ou la traversée en monomoteur des 180 kilomètres de Méditerranée qui séparent la Corse du continent.

Je serai toujours redevable au commissariat de l'air de m'avoir permis de découvrir le vol. Si c'était à refaire, je dirai comme Antoine Blondin: "Patron, remettez nous ça!"



* voir aussi les articles des commissaires  Barbaroux (janvier 2018), Bouillaud (janvier 2015- GAMA), Lépée (octobre 2012) et Vachet-Vallaz (juin 2014)
**Groupe aérien de liaison de l’école de l’air, devenu ensuite SIVEA

***
Le départ de l’Armée de l’air - mais aussi le vol en Mirage 2000- furent fêtés dignement, avec amerrissage forcé dans la piscine du mess, en présence du commissaire général Durbise, directeur du commissariat de l’air en région aérienne sud, qui put ainsi apprécier la parfaite intégration du commissaire sur la base,  illustration d’une grande tradition de l’Armée de l’air dont certains escadrons interviennent dans des missions de recherche et sauvetage en mer !