lundi 18 juillet 2016

Les commissaires de base et le contentieux aérien

Au temps des commissaires de l’air, les constatations immédiates et les premiers traitements administratifs suite à la chute d’un aéronef de l’armée de l’air, à un « mur du son » ou à un simple passage rapide d’un avion de chasse sur une étable ou un paisible troupeau étaient une spécificité - parmi d’autres -  des nombreuses fonctions du commissaire de base.

Le commissaire de la base aérienne, celui de la base de rattachement de l’aéronef ou celui de la base la plus proche de l’accident, se rendait sur place en urgence et procédait aux premières constatations juridico-administratives, avant d’être rejoint par un représentant de la direction régionale du commissariat de l’air, chargé de la constitution et du portage du dossier contentieux proprement dit, avant transmission au SGA.


Voici, à titre d’illustration, l’histoire d’un « Mirage sans pilote » qui a défrayé la chronique le 31 mai 1984 en Alsace et en Allemagne mais n’a, heureusement, occasionné aucune perte humaine, ni militaire ni civile.

Un avion sans pilote

L’histoire débute sur la base aérienne de Colmar, en ce début d’après-midi du vendredi 31 mai 1984, lorsqu’un Mirage III de la 13ème escadre, en vol d’essai après intervention sur le réacteur, présente tous les signes d’une panne moteur. Le pilote rend compte puis, sur ordre, doit s’éjecter, quittant son avion au-dessus d’une vaste zone boisée. Le pilote est indemne.

Mais…l’appareil poursuit son vol ! Deux avions sont alors dépêchés pour une interception au canon. Comme la plaine d’Alsace et la vallée du Rhin sont des zones à forte densité de population, l’interception ne peut se faire. L’avion sans pilote, stable grâce à ses commandes bien compensées, poursuit sa route à faible vitesse vers le nord-est, transite à l’est de Strasbourg, franchit la frontière allemande et longe la ville de Karlsruhe. Quelques temps après, à court de carburant, le Mirage « se présente » en courte finale, en mode planant, sur le village de Oberderdingen en RFA (comme on disait alors).

Les planètes sont heureusement alignées pour faire en sorte que d'abord l’avion « se pose » à plat, ensuite dans une bande de jardinets logés entre deux enfilades de maisons et, enfin, à un moment où aucun enfant ni aucun jardinier n’est présent sur la zone. Durant une heure, les PC opérationnels et les services de secours français et allemands ont été sur la brèche mais, comme il arrive parfois, la réalité dépasse la fiction.

Un commissaire de base sur les lieux du crash

Le jeune commissaire capitaine, commissaire de la base aérienne d’Achern*, est prévenu en ce milieu d’après-midi et doit rejoindre en urgence le lieu du crash. Il se prépare à assurer les premières constatations, dans un contexte doublement difficile, avec un avion sans pilote et sur un territoire étranger.

A son arrivée en fin d’après-midi, il constate le caractère miraculeux du crash, au milieu d’une zone pavillonnaire bien entretenue et très fleurie, typiquement allemande, seulement défigurée par une tranchée de plusieurs dizaines de mètres de long creusée par le fuselage.

En l’absence de victimes civiles, le rôle du commissaire se cantonne cette fois à une première constatation des dégâts matériels, en vue d’une indemnisation par les services français, dans le cadre des accords de résidence des forces françaises en Allemagne.

La formation et l’expérience des commissaires de base ont permis à ces derniers pendant 35 ans, dans des moments souvent douloureux pour l’armée de l’air, d’assurer une interface juridico-administrative efficace entre le commandement de l’armée de l’air et le service du commissariat de l’air.
JP

*cf. notre article sur l’armée de l’air dans les FFA (août 2015)

Le SCA aujourd’hui :  la mise en œuvre des moyens juridiques nécessaires au règlement des dommages non contractuels causés ou subis par les armées, la défense des intérêts du ministère de la défense devant les tribunaux administratifs, la mise en œuvre de la protection juridique des agents de l’Etat sont assurés (hors OPEX) par cinq services locaux du contentieux (SLC) répartis sur le territoire national.