Par Jean-Louis Pons (ECA 73)
Le patrimoine : belle et vaste notion qui m'a intéressé depuis mon plus jeune âge. Pour faire simple, c'est le legs des générations qui nous ont précédés et que nous devons transmettre aux générations suivantes en le préservant et en l'enrichissant de nos propres réalisations.
Au Bourget
Le MAE à Meudon |
Je me souviens notamment, par un samedi matin ensoleillé, du premier vol d'un Dewoitine 520 remis en état de vol par des passionnés (vieilles racines). La mise en route du moteur Hispano Suiza de 920 cv avait ému l'assistance et les évolutions de ce remarquable chasseur, qui rivalisait avec le Messerschmitt BF 109 en 1940, avaient mouillé les yeux de bien des participants. Ce D-520 a participé aux salons de l'aéronautique de 1981 et 1983 avec de très belles présentation en vol.(2)
Au ministère de l’environnement
C'est mon premier poste de chargé de mission pour les affaires internationales à la direction de la nature et des paysages du ministère de l'environnement en 1991 qui m'a mis de plein pied au contact du patrimoine naturel puis du patrimoine culturel avec la reconnaissance des paysages culturels au sein de la convention du patrimoine mondial de 1972. L'élaboration du dossier de candidature du Canal Royal des deux Mers (canal du Midi) au Patrimoine mondial fut à ce titre un travail d'équipe d'une grande richesse eu égard à l'importance du sujet. J'ai rencontré des personnes passionnées: des enseignants, des représentants de l'Etablissement public "Voies navigables de France", des architectes des bâtiments de France, des inspecteurs des sites et des artisans...
Sur mes conseils, l'Association nationale des commissaires de l’air (ANCA) a pu bénéficier des connaissances de Jeanne Hugon de Soeux, auteur d'un ouvrage passionnant sur cette thématique ("Le chemin qui marche"), lors d'une conférence à la cité de l'Air.
A Voies navigables de France
Lors de mon affectation à VNF, j'ai reçu la visite de Nicole Vallery-Radot †, journaliste et alors présidente de l'association "Construire le patrimoine". La raison de cette visite était de sortir l'association d'une situation financière compliquée du fait des dettes accumulées pour occupation du domaine public fluvial par la péniche acquise par l'association à VNF... Dura lex, sed lex.
Baptisée Nautilus, cette péniche était destinée à présenter les savoirs faire des artisans dans les villes traversées par une voie d'eau navigable. Si ce projet était séduisant, sa mise en œuvre était parsemée d'obstacles réglementaires, organisationnels et financiers...Avec conviction et talent, la présidente accompagnée d'un ami architecte, Michel Tharan, m'a décrit les objectifs de l'association, notamment la transmission des savoirs faire, les réalisations de ses talentueux membres: tailleurs de pierre, céramiste, fabriquant de poêles alsaciens, charpentiers, ébénistes.
Aussi, sensible aux arguments développés par Nicole Vallery-Radot et aux conséquences du paiement de la dette exigible (titre de perception pour les spécialistes des finances publiques), j'ai plaidé la cause de l'association auprès du Directeur interrégional de VNF qui m'a donné carte blanche pour accorder une remise gracieuse d'une partie de la dette.
De la terre cuite...
J'avais dû faire état dans nos échanges de mon intérêt pour la céramique. Toujours est- il que je reçus une invitation pour un week-end de découverte avec tous les artisans d'une tuilerie située à Soulaine d'Huys près de Troyes. Ayant quitté VNF pour la DATAR, j'acceptais avec plaisir cette invitation qui me renvoyait à ma prime jeunesse à la briqueterie familiale implantée près de l'oued Mazafran sur la commune de Koléa (département d'Alger).
A la retraite, je suis retourné à la tuilerie Royer participer à un "grand feu" pour cuire 80 tonnes de tuiles, carreaux de sol, poteries dans un four semi circulaire. Ces produits faits main sont prisés des architectes des bâtiments de France et servent essentiellement à la restauration du patrimoine classé. La cuisson dure 6 jours et 6 nuits (bois et charbon en grains) et la température du four s'élève progressivement jusqu'à 1100 degrés. Je n'ai passé que la dernière nuit sur le four avec Jean-Louis Royer (photo) et je peux témoigner que ce process requière endurance, attention constante et expérience.En fin de cuisson, la chaleur accumulée est utilisée pour accélérer le séchage des produits crus avant cuisson.
...au retour de la terre crue
La terre crue - un comble pour un fils et petit-fils de briquetier! - retrouve un regain d'intérêt pour ses qualités mécaniques et thermiques.
C'est ainsi que j'ai co-organisé il y 2 ans avec Michel Tharan, désormais président de « Construire le Patrimoine » - en partenariat avec l'association « Maisons paysannes de France » et des élus de collectivités territoriales - les Assises de la terre crue dans le cadre du projet de création du parc naturel régional de l'Astarac dans le Gers. En effet, le Gers a su conserver de nombreux bâtiments en terre crue et notamment une ferme fortifiée millénaire à Sainte Christie d'Armagnac.
Il convient également de citer la région Guyane avec une unité de production de briques de terre crue compactées à partir de latérite, utilisées dans la construction d'immeubles.
Ainsi, ce matériau inépuisable, vieux comme le monde, neutre en carbone, offre des qualités de résistance, d'isolation et de pérennité étonnantes et a toute sa place dans la transition énergétique.
(1) Hangar à dirigeables, désormais propriété du département des Hauts-de-Seine, rénové par ses soins et ouvert au public
(2) Détruit lors d’un meeting à Vannes en 1986
Sur le même sujet, lire aussi notre article : « Un châtelain, ancien commissaire de l’air » 10 juillet 2019 (mot-clé : hugot)