Tout commissaire de l’air venant à parcourir ses vieux albums photos, objets aujourd’hui passés de mode, prend plaisir à se remémorer ses chefs, ses collègues, ses collaborateurs et, parmi ceux-ci, les différentes secrétaires civiles et militaires qui l’ont accompagné durant sa carrière. Refermant ces précieux albums, il ne peut s’empêcher de penser, avec le recul du temps, que certaines de ces secrétaires ont marqué sa mémoire, d’autres moins. Mais, soyons modestes, l’inverse serait tout aussi vrai si l’on interrogeait ces dernières.
L’auteur de ces lignes souhaite saluer symboliquement toutes les secrétaires des anciens commissaires de l’air, en évoquant l’une d’entre elles, avec qui il eut la chance de travailler.
Plusieurs commissaires de la base aérienne 178 Achern (1), base relevant à l’époque des Forces Françaises en Allemagne (FFA), ont bénéficié des services de madame Madeleine Harter, de 1974 à 1984. En paraphrasant une chanson célèbre, on aurait pu dire qu'elle « fit parler, parler, parler, parler d'elle longtemps ».
Affecté à Achern en 1982, j’étais en début de carrière et l’intéressée en fin de carrière. Je compris assez vite que ma secrétaire, derrière un profil classique de grand-mère distinguée, discrète et souriante, cachait une forte personnalité, voire même ce qu’on appelle un certain caractère. Comme dit cette chanson, « elle avait un je ne sais quoi !». Selon les moments, l’œil pouvait être pétillant de malice ou dangereusement sombre.Bien sûr, toujours urbaine vis-à-vis de son commissaire mais, parfois, ferme sur tel ou tel sujet du moment. Les échos me revenaient de cette fermeté à l’égard de ses collègues personnels civils, lorsque leurs demandes ou leurs erreurs appelaient un recadrage de sa part.
Accords de Paris |
Madame Harter était célibataire. Elle arrivait en voiture le matin vers 8h, une tradition allemande dans les administrations, déjeunait chez elle le midi et quittait le travail plus tard que ses collègues, le temps de contrôler et déposer les parapheurs du soir sur le bureau de son chef, comme sur toutes les bases aériennes (et au delà).
L’affectation sur un poste de commissaire de base n’était déjà pas une sinécure, mais l’arrivée dans l’environnement FFA imposait beaucoup de circonspection, un talent de navigateur entre les dispositifs créés après la guerre et sédimentés avec le temps. Mme Harter avait le chic pour anticiper ou déminer les écueils liés à l’organisation Air (avec une sous-direction du commissariat de l’air sur place, relayant la direction régionale de la FATAC-1ère RA à Metz, et un grand nombre d’unités Air disséminées en RFA) mais aussi les difficultés tenant à deux organismes FFA incontournables, un foyer central et l’économat des armées.
Madeleine Harter prit sa retraite en 1984, après 33 ans de bons et loyaux services, anticipant de peu - sans le savoir- la fin de la zone FFA au début des années 1990, et donc la disparition de ce statut de PCE (3) dont elle fut une digne représentante au service de l'Armée de l'air.Jacques Primault (ECA 75)
(1) Notamment les commissaires Le Minor (74-75), Bano (75-79), Van Grevenynghe (79-82) et Primault (82-85)
(2) Statut très particulier car ces agents étaient de droit privé relevant du droit du travail et des régimes de protection sociale allemands. Mais, contrairement à leur titre, ils pouvaient être de nationalité allemande ou française.
(3) Ils furent licenciés entre 1992 et 1999 suite au départ des troupes militaires françaises stationnées en Allemagne