mardi 11 janvier 2022

2001 : Opération Euro à l’ELCA d’Evreux

2 janvier 2002 : le franc va laisser la place à l’euro.  L’année précédente, l’ELCA d’Evreux va  participer, comme beaucoup d’autres structures en France, à la préparation de cet évènement national, et d’une façon assez originale. 

En effet, des trains blindés spécialement affrétés et placés sous haute protection doivent transporter partout en Europe les nouvelles pièces de monnaie, et en France vers les 81 dépôts de stockage départementaux. Un colossal dispositif de sécurité, coordonné par le ministère de l'Intérieur et comprenant plusieurs milliers de policiers et de militaires, entoure ces transferts. L'itinéraire des convois et le calendrier des livraisons dans les départements est tenu secret et certains trajets sont même surveillés par satellite. 

Le commandant de la base aérienne d’Evreux, le colonel Claude Baillet (EA 75) raconte cette opération dans son livre « Dernier sur Noratlas, Premier sur Airbus » (1)

« L’arrivée de l’euro s’annonce et c’est, en ce printemps 2001, que commencent les réunions pour la préparer. La future monnaie sera entreposée en partie sur la base.

Le 31 août 2001, à cinq heures et demie du matin, le premier train transportant des euros entre sur la base. La route nationale qui longe la clôture a été fermée. Il y a du brouillard, des feux clignotent dans la brume, le lourd convoi de fret traverse tout doucement les quatre voies entre les gendarmes et les phares des autos arrêtées: on se croirait dans un film de guerre. Chance des débutants et précaution des gendarmes qui remontent le bouchon qui se forme, il n'y a pas d'accident. 

Le train vient se ranger le long des quais de l'établissement logistique du commissariat de l'air, l'ELCA (2). Les commissaires gèrent un vaste entrepôt sur la base, desservi par cette voie ferrée qui n'a plus servi depuis longtemps. Il y a même une locomotive et des wagons pour déplacer des matériels d'un hangar à l'autre ... Le train arrêté, c'est l'ouverture des wagons plombés. L'opération est surveillée par des gendarmes de l'air, des policiers vêtus de noir et équipés pour la guerre, des fusiliers commandos de la base en tenue de combat dont le véhicule 

blindé bloque la route d'entrée du site, par le préfet Fragneau, responsable de tout dans le département, de ses troupes, et moi, responsable sur le site ... et sans doute de quelques lapins de garenne, réveillés par l'agitation inhabituelle. 

Des palettes de pièces sont déchargées et entreposées dans des hangars de l'ELCA. Lorsque tout est fini, le hangar est fermé et placé sous alarme en attendant le prochain train. J'invite le préfet et sa suite à un petit-déjeuner dans mon bureau. Il me confirme ce que je pensais. Cela fait beaucoup d'agitation pour des tonnes de pièces qui, en calculant bien, doivent permettre de se payer une belle voiture, mais pas plus. Venir sur la base, franchir les différents barrages et surtout repartir avec ça (combien de semi-remorques ?) en affrontant les Cocoys avec leur engin blindé et leurs armes de guerre : autant voler une grosse bagnole sur le parking du supermarché voisin ! 

Notre dispositif ne fait que renforcer la confiance que le préfet a dans le sérieux de la base. Il me confirme qu'il en témoignera, en ne se levant pas pour venir assister à l'arrivée du prochain convoi. Hormis le petit-déjeuner et le plaisir de le prendre avec moi, rien ne justifie son déplacement. Tout cela avec l'humour chaleureux dont il fait preuve. »

(1)Général Claude Baillet, éd. JPO 2022       (2) Dirigé par le commandant Moronvalle

Mars 2001, inspection de l'ELCA par le cre gal Clouzot,  DCCA (à dr.)