samedi 21 novembre 2020

ECA : Voyage d’étude en Allemagne en 1977

Outre leurs nombreuses visites d’établissements industriels durant leur scolarité à Salon, les élèves de l’école du commissariat de l’air effectuaient, comme dans toutes les grandes écoles militaires, un voyage d’étude, bisannuel car regroupant les 2 promotions*. Organisé dans les années 70 et 80, ce voyage avait pour but de découvrir les Forces françaises en Allemagne et notamment les bases aériennes d’Achern  et de Berlin Tegel** ainsi que leurs escadrons d’écoute. 

A titre d’illustration, Yves Ferrié (ECA 76) nous raconte le voyage en Allemagne des promotions 75 et 76 en mai 1977.

Après avoir retrouvé un programme de ce séjour, édité à l’alcool, bien avant que n’apparaissent les imprimantes laser, l’AMICAA m’a demandé de relater  ce voyage traditionnel des élèves commissaires dans les années 70.  J’évoquerai simplement quelques images fugitives qui ont survécu à l’oubli et  donneront une idée de l’Allemagne autrefois divisée.

Le trajet entre la Provence et l’Allemagne s’effectuait à bord d’un Noratlas 2501 « la grise », avion rustique, bruyant et pas pressurisé  qui malmenait les tympans des passagers enrhumés. Les toilettes se réduisaient à un tuyau en caoutchouc terminé par un entonnoir… qui ressemblait un peu à une perche de ravitaillement en vol! Pour se distraire, on passait parfois la tête dans la demi-bulle  en plexiglas qui surmontait le cockpit et permettait au navigateur de faire un relevé astronomique.

Une première étape à Strasbourg était réservée à la visite de la base d’Entzheim - notamment les services du commissaire de base (cre cdt Peyronnet) et la 33ème  escadre de reconnaissance équipée de Mirage III R -, de la sous-direction du commissariat de l’air à Achern (cre cdt Le Minor sous-directeur) et de l’Economat des armées (à Buhl près de Baden Baden). De cette journée, alors que je ne suis pas amateur de « grosse  saucisse » et que je n’avais pas voulu me désolidariser de la promotion, j’ai aussi retenu la colossale choucroute dégustée à la maison Kammerzell, restaurant célébrissime  de Strasbourg.


Après une deuxième étape, à Hanovre ponctuée par la visite du détachement de Goslar spécialisé dans les écoutes des communications des forces du Pacte de Varsovie, nous voilà à Berlin sur l’aéroport de Tegel (et base aérienne 165, mais sans commissaire de base, le premier étant affecté en 1979). Ces journées étaient essentiellement consacrées à la visite de la  ville, point de contact entre l’Occident et le monde communiste, en particulier la porte de Brandebourg, le Reichstag et le mur avec son no man’s land où étaient tombés beaucoup de transfuges. Je ne m’étendrai pas sur le Berlin nocturne qui occupait nos soirées libres. 


En tant que force d’occupation en Allemagne, les français pouvaient librement passer le checkpoint Charlie pour se rendre à Berlin-Est, excursion prévue dans notre programme.  En traversant le rideau de fer, je voulais savoir si les filles de l’Est ressemblaient aux belles espionnes venues du froid des romans de John Le Carré ou aux athlètes bodybuildées qui raflaient les médailles aux Jeux Olympiques. En fait, la réalité était toute autre et ne correspondait pas à mon imaginaire trompeur. 


Le secteur soviétique, dominé par l’impressionnante tour de télévision de 365 mètres, était assez austère en dépit d’une certaine animation sur l’Alexanderplatz. Mais les façades des immeubles plus éloignés du centre, non rénovés faute de moyens, gardaient encore la trace des éclats d’obus des combats d’avril-mai 1945.

Le séjour touchait déjà à sa fin, après une imposante parade des troupes à pied et blindées des forces alliées anglo-américaines et françaises et une virée dans un magasin américain pour effectuer des achats à des prix défiant toute concurrence. Je me souviens de l’impatience et de l’irritation des cadres de l’école qui attendaient que les élèves finissent leurs emplettes interminables. En particulier, j’en revois un – qui se reconnaitra peut-être -  courant comme un endiablé sous nos acclamations,  justement en poussant un diable gavé de cartons de marchandises, derrière le car qui avait commencé à rouler. 



Il y a bien longtemps que les éléments français en Allemagne ont été dissous et les souvenirs précis des visites administratives se sont effacés mais il me reste de ce voyage l’évocation un peu mélancolique d’une époque révolue.

* A noter que les élèves commissaires de l’air effectuaient dans les années 50 et 60 un voyage d’étude « ECA » en Afrique. Outre ces voyages propres à l’ECA, ils participaient aussi à 2 autres voyages organisés par l’école de l’air, le tour de France aérien en fin de 1ère année, le voyage de fin d’étude en fin de 2ème année. 

** Voir notre article du 27 octobre 2020