dimanche 3 mars 2019

Haut comité d’évaluation de la condition militaire

12ème rapport (juin 2018) très documenté et très riche en propositions du HCECM, où siège notre camarade Isabelle Delarbre (ECA79)


L’intégralité du rapport sur le site internet du ministère des armées : www.defense.gouv.fr (onglet « Vous et la Défense ») 

LA VIE DES MILITAIRES ET DE LEUR FAMILLE SELON LE LIEU D’AFFECTATION
(extraits)

"Le réseau des bases aériennes, initialement orientées vers la guerre à l’Est, a été reconfiguré.
N’apparaissant qu’en 1909, l’aéronautique militaire a un rapport plus récent aux territoires que les deux autres armées et par conséquent a un héritage moins lourd à gérer.

Créée en 1934, l’armée de l’air s’est dégagée des problématiques géographiques de l’armée de terre dont elle est issue, en s’appuyant sur des spécificités qui tiennent à ses matériels et à leur emploi.
La courte histoire de la géographie des bases aériennes résulte ainsi prioritairement du positionnement relatif de l’ennemi et du rayon d’action des aéronefs : le passage d’un rayon d’action des avions de 350 km en 1916 à près de 2 000 km en 2018, distance pouvant être triplée grâce à l’emport de bidons supplémentaires ou aux ravitaillements en vol, a permis une évolution profonde de son organisation spatiale.

L’ennemi se trouvant jusqu’à la fin du XXe siècle au Nord-Est, l’armée de l’air a organisé ses capacités et son réseau de bases aériennes en s’appuyant sur cette orientation générale.
Comme le souligne le capitaine Mickaël Aubout dans une thèse soutenue en 2013, la région Nord-Est «concentre le plus grand nombre d’ouvrages et d’infrastructures militaires. La prééminence de l’aviation militaire durant les conflits du XXe siècle a entraîné puis renforcé une répartition Nord-Est / Sud-Ouest : en première ligne les bases de l’aviation de combat, ensuite les bases de transport aérien et les centres logistiques, enfin les bases écoles dans le Sud-Ouest et le Sud. […] la  configuration du réseau actuel constitue un héritage de cette période. »(1)

À l’apogée de son déploiement territorial en 1940, l’armée de l’air comptait 404 plates-formes.
Les progrès techniques nécessitant de quitter les terrains sommaires et les réformes successives de format ont cependant réduit ce maillage. En 1946, seules 46 plates-formes étaient adaptées aux contraintes techniques des aéronefs d’alors. À la fin de la guerre d’Algérie, l’armée de l’air comptait 84 bases aériennes. Le nombre n’a fait que décroître depuis mais, jusqu’à la chute du mur de Berlin, les forces aériennes sont restées concentrées dans le Nord-Est de la France.

Les attentats du World Trade Center en 2001 ont accéléré la reconfiguration territoriale de l’armée de l’air et la fin de la prééminence donnée au Nord-Est. Pour faire face à une nouvelle menace, l’avion suicide, l’armée de l’air a renforcé ses capacités de veille et d’interception et adopté une posture opérationnelle orientée vers le contrôle continu de l’espace aérien français, le besoin étant d’autant plus important qu’entre 10 000 et 15 000 avions sillonnent quotidiennement le ciel français. Dès lors, l’armée de l’air a multiplié par six le nombre des avions en alerte d’interception et les a répartis sur tout le territoire.

Le désengagement à l’Est et le besoin de couverture de l’ensemble du territoire ont ainsi reconfiguré l’organisation spatiale de l’armée de l’air. « La fin de cette focalisation spatiale sur le Nord-Est  aboutit à un réaménagement du réseau avec la fermeture, durant les années 2000, de la moitié des bases aériennes de combat le long d’un axe Creil-Troyes-Dijon. La répartition des avions de combat s’est orientée en direction des bases du Sud de la France et, désormais, il est possible de constater un rééquilibrage entre le Nord-Est et le Sud de la métropole.»(1)

En 2018, le réseau de bases aériennes se caractérise par une rétraction, particulièrement marquée dans le quart Nord-Est. Sa répartition est désormais plus équilibrée, les plates-formes du sud de la France ayant été moins affectées par les restructurations de l’outil aérien. Le quart Sud-Ouest regroupe désormais 29 % des aviateurs tandis que le quart Nord-Est n’en accueille plus que 15 %. 11 % des effectifs de l’armée de l’air sont affectés en Île-de-France.

L’armée de l’air est passée d’une soixantaine de bases en 1990 à 25 emprises dont 15 bases aériennes plates-formes en 2018 (toutes les bases aériennes ne disposent pas d’une piste d’atterrissage).

Implantations de l’armée de l’air en métropole en 2018

Source : armée de l’air.

Les avions requièrent des installations aéroportuaires adaptées à leurs caractéristiques techniques et soumettent, parfois, la population à des nuisances sonores. Cela explique que peu à peu les terrains d’aviation sommaires aménagés en lisière de villes dans la première moitié du XXe siècle (Balard par exemple) ont été remplacés par des bases plates-formes avec piste durcie implantées de plus en plus en périphérie. En 2018, la plupart des plates-formes aériennes sont ainsi marquées par la ruralité de leur environnement. La plaine de la Crau ou la région de Luxeuil ne sont pas des aires densément urbanisées. La fermeture de la base de Reims tient, en partie, aux difficultés à faire évoluer les infrastructures existantes en zone urbaine.

Les rapports des militaires de l’armée de l’air à leur territoire d’affectation sont marqués par ces contraintes. Les aviateurs sont majoritairement implantés dans des zones à dominante rurale et ne sont que rarement affectés au cœur d’un centre urbain. Deux zones apparaissent soumises à de fortes contraintes de qualité de vie : Paris, au même titre que les autres armées, et Istres – Salon-de-Provence en raison des dynamiques socio-économiques du Sud-Est.

Un dernier aspect est fondamental pour cerner les particularités des liens des aviateurs avec leur lieu d’affectation. Les bases aériennes servent aujourd’hui de base de départ pour les opérations aériennes, non seulement au titre de la posture permanente de sûreté aérienne, mais aussi au titre des opérations extérieures, notamment au moment des ouvertures de théâtre.

Ainsi le 19 mars 2011, des Mirage 2000-D ont décollé de métropole pour bombarder une colonne de véhicules à proximité de Benghazi inaugurant les frappes en Libye. Plus près de nous, le 13 avril 2018, plusieurs aéronefs dont des Rafale ont décollé à 21h pour frapper des cibles en Syrie dans le cadre de l’opération Hamilton ; ils étaient de retour sur base le lendemain à 7h du matin.
Outil de combat, la base aérienne est ainsi au cœur des opérations intérieures et extérieures : les équipages en décollent pour  combattre et rejoignent leur domicile aussitôt rentrés.

L’armée de l’air en 2018
En 2018, l’armée de l’air gère plus de 41 000 militaires. Ils sont répartis dans 25 emprises principales dont 15 bases aériennes disposant d’une plate-forme aéroportuaire. On compte notamment 6 bases chasse, 3 bases transport et 4 bases école. En outre, les sites radar (Loperhet, Drachenbronn, Nice…) et les unités dédiées à la logistique et à la maintenance (Romorantin, Ambérieu, Châteaudun…) élargissent le nombre d’implantations. L’armée de l’air est également déployée sur 4 implantations outre-mer et 3 bases permanentes à l’étranger (Gabon, Djibouti, Abu-Dhabi).

23 % des aviateurs servent dans des organismes et services interarmées notamment à la DIRISI et au SCA.
L’armée de l’air est équipée de 232 avions de combat dont 98 Rafale, de 79 avions de transport dont 14 A400M, de 4 AWACS, de 14 avions ravitailleurs C135FR et KC 135, de 75 hélicoptères et de 6 drones Reaper.

Le service du commissariat des armées
Le service du commissariat des armées, qui compte 13 350 militaires, présente une configuration particulière. Jusqu’à la création d’un service interarmées en 2010, les commissaires relevaient de chaque armée et leur répartition géographique en découlait. Seuls les écoles et quelques établissements logistiques relevaient d’une logique d’implantation propre à tel ou tel service de
commissariat.

L’interarmisation du service d’une part, puis le rattachement au SCA des groupements de soutien de base de défense (GSBdD) en 2014, d’autre part, ont créé un réseau d’établissements échappant à toute logique globale d’organisation spatiale. La carte des implantations reflète l’héritage, imparfaitement rationnalisé (2), de chacune des armées et découle de la mutualisation menée à compter de 2008 des activités d’administration et de soutien commun, autrefois réalisées dans les unités opérationnelles, dans 51 groupements de soutien en métropole.

L’organisation spatiale du SCA s’étend ainsi sur tout le territoire, avec une concentration dans les
garnisons du Nord-Est et du Sud-Est.

Implantations du service du commissariat des armées en 2017

Source : SCA, 2017.

Poursuivant sa logique de mutualisation et de rationalisation de ses filières et de ses métiers tout en prévoyant une large « bascule vers l’avant », le SCA devrait réduire le nombre de ses GSBdD en favorisant les antennes co-localisées avec des formations des armées.
D’autre part, la numérisation des processus d’appel et de délivrance des soutiens induit des dynamiques de dé-territorialisation qui affecteront naturellement les rapports des militaires du SCA avec leur environnement professionnel et personnel.
Ces transformations devraient s’accompagner d’une évolution de la répartition géographique du service."

(1) Capitaine Mickaël Aubout, Les bases de la puissance aérienne 1909 – 2012, CESA, La documentation française, Paris, 2015.
(2) Généralisés en 2011, les GSBdD ont été constitués sur chaque ressort de BdD à partir des services dédiés à l’administration générale et au soutien commun (AGSC) existants préalablement dans les formations des armées.
Les GSBdD se sont formés par agrégation sans qu’ait pu être préalablement rationnalisée l’extrême diversité des situations de soutien vécues localement par les militaires. La rationalisation des activités d’AGSC est un objectif du transfert des GSBdD au SCA en 2014 mais n’a aucunement constitué un préalable.

COMPOSITION DU HAUT COMITÉ D’ÉVALUATION DE LA CONDITION MILITAIRE

2018

PRÉSIDENT
Monsieur Bernard Pêcheur, Président de section au Conseil d’État (h.)

VICE-PRÉSIDENT
Monsieur Francis Lamy, Conseiller d’État, Président adjoint de la section de l’intérieur du Conseil d’État

MEMBRES
Amiral (2e section) Pierrick Blairon, Ancien major général des armées, Ancien Conseiller maître en service extraordinaire à la Cour des comptes

Madame Martine de Boisdeffre
Présidente de la section du rapport et des études du Conseil d’État

Madame Isabelle Delarbre, Administrateur de sociétés, Senior advisor Achats

Monsieur Dominique Olivier,Chef d’entreprise

Madame Véronique Rouzaud, Directrice des ressources humaines Europe du sud de la société Amazon

Monsieur Jean-Luc Tavernier, Directeur général de l’Insee (membre de droit) représenté par Monsieur Pascal Rivière Chef de l’inspection générale de l’Insee

Général d’armée (2e section) Bernard Thorette, Ancien chef d’état-major de l’armée de terre
Conseiller d’État honoraire

SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
Contrôleur général des armées Olivier Maigne