lundi 4 juillet 2016

Site de Balard : les prestations en PPP

Nous publions un article paru dans le journal l’Opinion sur l’actualité du site de Balard, portant sur les services assurés au moyen du partenariat public-privé (PPP), sujet toujours sensible. 
Cet article de presse contient peut-être des imprécisions mais il nous a paru utile de le rediffuser pour faire mieux connaitre l’organisation et la vision d’un partenaire majeur du ministère – Sodexo -  dans un domaine relevant du commissariat des armées. Le contenu est bien sûr de la responsabilité de l’auteur. Nul doute que la dernière phrase - sur des propos prêtés à Sodexo - appellera des commentaires, que nos lecteurs pourront nous communiquer en écrivant à : amicaa@sfr.fr 

« Sodexo : à Balard, le privé assure l’intendance

En d’autres temps, on l’aurait sans doute baptisée la « grande cantinière » de Balard. L’époque ne le permet plus, mais le métier de Véronika Roux est pourtant bien celui-là. A la tête de Sodexo Défense Services, la branche du groupe français Sodexo qu’elle préside, elle nourrit et gère l’intendance des personnels du nouveau ministère de la Défense, à Balard (Paris 15e). Pour cette fille d’un général serbe, championne de tir à l’arme de poing, il y a là comme un retour aux sources. Si ses racines familiales sont en ex-Yougoslavie, « je suis française », dit-elle, et pas peu fière de l’être. Ingénieur des mines, elle a d’abord travaillé chez Thalès avant de rejoindre Sodexo en 2010.


Chez Sodexo, l’entreprise de services créée en 1966, on cultive « un très fort attachement à l’armée française. La Défense, c’est notre histoire, notre ADN », explique-t-elle. Le premier contrat du fondateur Pierre Bellon avait été pour la fourniture de plateaux-repas à la marine. Un demi-siècle plus tard, Balard est « son fleuron ».

Balard, c’est le plus gros partenariat public-privé (PPP) dans le secteur de la Défense. Occupés depuis l’été dernier, ces bâtiments accueillent le ministère de la Défense et les états-majors militaires. Le projet a été lancé sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, en faisant appel au secteur privé. Un consortium, baptisé Opale et regroupant Bouygues, Thales, Delkia et Sodexo, a construit le site, le fait fonctionner au quotidien et le loue à l’Etat pour 154 millions d’euros par an.

En 2042, les bâtiments deviendront la propriété de l’Etat.

Au sein de ce consortium, Sodexo nourrit les 9 600 militaires et civils qui travaillent à Balard. Mais pas seulement. Désormais, le privé se niche partout dans l’activité militaire. Ainsi du « pavoisement », c’est-à-dire la gestion du stock des drapeaux ! Tricolores ou étrangers, pour les visites officielles. C’est Sodexo qui s’assure que le bon drapeau – ne pas confondre Niger et Nigeria, Slovaquie et Slovénie – sera disponible au bon moment au bon endroit. Ensuite, c’est un militaire qui le hisse, selon le règlement.

Plus de corvées de balayage non plus, dans une armée professionnelle. Sodexo s’occupe du jardinage, de la gestion des déchets et de l’entretien des bureaux et des toilettes. Non sans veiller à respecter de sévères règles de sécurité : on n’époussette pas impunément les étagères du Directeur du renseignement militaire. Tout le personnel fait l’objet d’un contrôle par la gendarmerie et les personnels de ménage ne peuvent entrer dans un bureau en l’absence de son titulaire. Mieux, dans les secteurs les plus sensibles comme le centre de préparation et de conduite des opérations, ils sont accompagnés en permanence par des gendarmes. Interdiction est faite d’employer des intérimaires et des stagiaires : pour les remplacements, un « pool » d’un millier de personnes est disponible. Des règles similaires valent pour la société de gardiennage Seris à laquelle Sodexo sous-traite le filtrage et l’accueil sur le site.

L’entreprise fournit également un service d’hôtellerie, avec 750 chambres pour les célibataires ou les personnels de passage, gère la piscine de 25 mètres, s’occupe d’un service de conciergerie et divers services, comme un salon de coiffure (15 euros pour les hommes, 25 pour les femmes), un pressing et un petit magasin… Les 256 distributeurs automatiques de boissons et confiseries sont accessibles grâce à un badge unique.

Le gros morceau reste quand même la restauration, avec 7 900 repas servis en moyenne chaque jour. Les opérations militaires ne s’arrêtant pas, le service doit être assuré 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Deux cuisines centrales fournissent dix restaurants (selfs), mais on peut choisir également l’une des deux brasseries, alors que les « salons des officiers » sont réservés aux repas des grands chefs.

L’un des casse-tête de la Sodexo est le paiement des repas. Le maquis administratif des armées est tel qu’il n’y a pas moins de soixante tarifs différents, selon les grades, les statuts et la couleur de l’uniforme. Ainsi les officiers de l’armée de terre déjeunent gratuitement alors que les marins paient leur repas.

Au total, Sodexo emploie 350 personnes sur le site de Balard et facture l’ensemble de ses prestations à hauteur de 26 millions d’euros par an. Au regard de l’activité défense de Sodexo (1,4 milliard au niveau mondial, 7 % de l’activité du groupe), c’est très peu, mais c’est « emblématique pour nous » se réjouit Véronika Roux. Un « fleuron » qui n’est, espère-t-elle, qu’un premier pas vers une « externalisation » plus importante – c’est-à-dire une privatisation – de la logistique militaire française. »

(remerciements à l’Opinion et Jean-Dominique Merchet Secret Défense– parution du 14/15 juin)