mardi 6 juin 2017

Le commissaire général Pierre de Broca

Nous poursuivons nos biographies des grands anciens du commissariat de l’air, avec le commissaire général Pierre de Broca qui, comme beaucoup de ceux de cette génération, au terme d’une carrière de 38 ans presque entièrement consacrée à l’Armée de l’air, aura été pilote opérationnel pendant huit ans, officier d’administration de terrain quatorze ans, puis officier dans l’intendance de l’air cinq ans et, enfin, commissaire de l’air huit ans.


Né le 19 juin 1896 à Agen, Pierre de Broca (1) fait ses études au hasard des garnisons de ses parents : Montauban, Auch puis Toulouse. Il passe son premier bac scientifique en juillet 1914 puis, le second en juillet 1919, en philosophie. Sportif, il est de bonne  taille (1m 79)  et pratique le football, l’athlétisme et surtout le rugby.


LE POILU


Il écrit : « A la déclaration de guerre en août 1914, mon père parti au front, je suis ma mère à Agen et en octobre j’entre au lycée de cette ville, pour préparer St Cyr. 

Mais la guerre qui, pour les Français comme pour les Allemands, ne devait être qu’une marche triomphale sur Berlin ou sur Paris se stabilise, après la bataille de la Marne. Comme elle menace de durer, je décide de m’engager. »

Le 9 janvier 1915, il rejoint le 88e d’infanterie au dépôt de Mirande dans le Gers et s’engage pour la durée de la guerre. En avril, il part à Joinville-le-Pont suivre les cours d’aspirant. Promu aspirant en septembre et affecté au 9e d’infanterie, il rejoint le front au début du mois d’octobre.
Sous-lieutenant en mai 1916, il obtient sa première citation. Il participe à toutes les attaques de son régiment : Artois, Champagne, Lorraine, Verdun. Lieutenant en mai 1918, blessé et cité à nouveau, il quitte l’infanterie pour l’aviation en 1918.

LE PILOTE

Il rejoint Dijon puis Levroux (Indre), où il débute son apprentissage de pilote. Il obtient le brevet de pilote militaire le 11 janvier 1919 à Avord (brevet n° 17 780) et le brevet de pilote civil le 24 juillet. Victime d’un premier accident aérien le 20 juillet 1920 à Cazaux, il est affecté comme instructeur d’armement au « Centre d’instruction des spécialistes de l’aviation », qui dépend du 18ème corps d’armée de Bordeaux.

En patrouille sur Bréguet XIV
En juillet 1923, il est volontaire pour le Levant (campagne du djebel Druze). Il écrit : « Je suis d’abord affecté à l’état-major de l’armée de l’air à Beyrouth, puis je pars au début de 1924 pour la 4ème escadrille du 39ème régiment d’aviation à Damas ».(2)

Victime d’un très grave accident d’avion à Damas le 5 avril 1924 au départ d’une mission pour le Djebel Druze (panne au décollage, l’avion prenant feu en s’abattant au sol), il est grièvement brûlé et hospitalisé à l’hôpital militaire de Damas. Son courage lui vaut une citation à l’ordre de l’armée le 30 juin 1924. Après un second accident au Levant le 29 avril 1925, il est rapatrié sanitaire en juin 1925.

L’OFFICIER D’ADMINISTRATION

Il écrit : « Je suis affecté comme adjoint au colonel commandant le 35ème régiment d’aviation à Lyon Bron. Mais, à nouveau victime d’un grave accident le 14 juin 1926, j’abandonne le pilotage pour entamer ma reconversion dans l’administration. »

1931
Après le 35ème régiment d’aviation, il est nommé, le 1er octobre 1931, adjoint au commandement du Centre aéronautique n°35 de Lyon (14ème région militaire, 4ème brigade aéronautique) puis adjoint au commandant de la 5ème brigade aérienne le 1er juillet 1932. Son action en faveur du sport pour la jeunesse lui permet d’obtenir deux lettres de satisfaction du ministère de l’Education nationale.

Radié du personnel navigant avec une invalidité permanente de 60%,  il est intégré dans le corps des officiers des services administratifs par décision ministérielle du 22 novembre 1935. C’est en qualité de « major » du bataillon de l’air de la base aérienne 105 de Lyon Bron (poste qu’il occupe de fait depuis mai 1934)  qu’il passe commandant d’escadron le 1er septembre 1937.

Motivé par son nouveau métier où il est très apprécié, il fait acte de candidature, le 31 janvier 1938,  pour passer dans le corps de l’intendance de l’armée de l’air « en prévision de sa création éventuelle » (lettre ci-contre) (3). Dès le 17 février, l’EMAA lui fait savoir que sa demande est « sans objet », les critères d’intégration n’étant pas définis.

En 1939, à la déclaration de guerre, il rejoint Aulnat où la BA 105 est transférée. Il s'y trouve en mai 40, avant un repli à Rodez (Aveyron) puis à Gaillac (Tarn). Après l'armistice, il reprend ses fonctions sur la BA 105 le 22 juillet avant d'assurer, durant le mois de septembre seulement, la fonction de sous-directeur des services administratifs de la base de stockage, qui est située sur la partie sud du terrain. Placé en congé d’armistice le 9 octobre 1940, il est désigné le 30 décembre suivant  pour faire fonction d’intendant de l’air, à nouveau sur la base de stockage de Clermont, puis à Salon-de-Provence en mai 1941 et enfin à l’intendance de l’air de Lyon en avril 1942, où il reste jusqu’à la fin de la guerre et où il est promu lieutenant-colonel (administratif) le 15 décembre 1943.

A la Libération, les règlements de compte vont bon train et, comme il est d’usage fin 44-début 45 (4), la commission d’enquête du ministère de l’air l’interroge sur une éventuelle participation dans l’un des 22 mouvements de Vichy à caractère pro-nazi. En outre, il lui est demandé de justifier son absence de ralliement à Londres. Dans une lettre de trois pages, empreinte de dignité et appuyée d’exemples concrets, il expose ce que fut son action au cours de cette période particulièrement difficile. Nommé lieutenant- colonel à titre de régularisation et définitif en juin 1945, il effectue un stage à l’Ecole Supérieure d'Intendance (ESI) du 5 avril au 31 décembre 1945. Le 25 du même mois, il est nommé commissaire ordonnateur de deuxième classe (commissaire lieutenant-colonel) et débute sa troisième carrière.

LE COMMISSAIRE

A l’issue de l’ESI, en janvier 1946, il est affecté au ministère des armées à la section financière du secrétariat général.  A la rentrée 1947, après vingt mois passés à ce poste, il revient à Lyon comme chef de service de l’intendance de l’air, poste qu’il connait particulièrement bien depuis son affectation de 1941 à 1944. Le 28 décembre 1948, il quitte Lyon pour Lahr, en Allemagne. Il est promu commissaire colonel en janvier 1949  et occupe le poste de directeur du commissariat de la 1re division aérienne jusqu’en novembre.

Le reste de sa carrière se déroule en Afrique du nord  où il est sous-directeur du commissariat de la zone Air Maroc à partir du 16 novembre 1949, sous l’autorité du commissaire général Habert à Alger, directeur du commissariat de la 5e région aérienne.

Il quitte l’armée de l’air à sa limite d’âge le 19 juin 1953, avant d’être promu commissaire général le 1er juillet au titre du cadre de réserve. Un an plus tard, son fils Jean intègre l’école du commissariat de l’air à Salon.

1983-Le père et ses deux fils, le gal de CA Henri de Broca (g) et le cre gal de BA Jean de Broca (d) 

Le commissaire général Pierre de Broca décède le 23 février 1987 à l’hôpital de Lyon.

Principales décorations :
Croix de guerre 14/18 et des TOE
Croix du combattant volontaire
Commandeur de la légion d’honneur
Médaille interalliés de 1920
Chevalier de la couronne de Belgique
Médaille commémorative du Levant
Totalise 753 heures de vol

Remerciements aux commissaires généraux (2S) Jean de Broca et François Aubry.

(1)Baptisé Achille, mais son prénom d’usage est Pierre 
(2) Sur Bréguet XIV
(3)Cette anticipation prouve que malgré l’échec en 1934 de la création d’un corps de commissaires de l’air,  l’idée perdurait de développer une administration propre à l’armée de l’air. Nous reviendrons sur ce point dans un prochain article.
(4)Voir à ce sujet la biographie du commissaire colonel Cognault