samedi 3 février 2024

2003: le film des 50 ans de l'ECA

 

A l’occasion des 50 ans de l’école du commissariat de l’air (ECA) en 2003, la direction centrale du commissariat de l’air (DCCA) décide de faire réaliser un film souvenir sur l’école, selon un scénario rapprochant 1953 et 2003. Les protagonistes en sont le commissaire général  Arin, ancien inspecteur du commissariat et de l’administration de l’Armée de l’air (ECA 53, première promotion de recrutement direct), les cadres de l’école (commissaire colonel Serra, directeur, commissaires Delprat, Glappier, et Mozgawa), madame Rebuffel (secrétaire de l’école) et les élèves des promotions 2002 et 2003.

Le film de 28 minutes, réalisé par l’ECPAD (M Guy Bonnefoy) sera diffusé en boucle lors des journées commémoratives des 13 et 14 novembre 2003 organisées à Salon-de-Provence.

Commissaire général Arin : comment s'est passée notre arrivée en 1953 ? J’ai des souvenirs très précis. C'était le 5 octobre 1953 à 8h du matin. Nous sommes arrivés - j'emploierai volontiers l'expression – « pour essuyer les plâtres ». Maintenant, 50 ans après, j'ai une l'impression de très grande confiance, je dirais même de confiance dans la continuité parce que tout évolue, le monde change. Les conditions sont, certes, plus confortables, les installations de l’école, les chambrées, les salles de cours sont très différentes mais, finalement, ce qui compte ce n’est pas le décor, c’est le fond et l’objectif est toujours le même : former des officiers et des administrateurs. 

En découvrant l’école en 1953, mon impression a d’abord été la surprise. J’étais persuadé que le soir, après l’activité du jour, j’irai en ville voir si je pouvais trouver une chambre.  Le régime de l’internat est un régime particulièrement sévère et nous a beaucoup surpris. Bon, on en n’est pas mort ! Nous sommes arrivés le matin. Nous avons perçu le paquetage immédiatement. L’instruction militaire et sportive de formation de base commençait le jour même, je dirais même le jour et la nuit suivante.


Quand je reviens 50 ans après, l’impression que cela me fait quand je revois les visages, c’est qu’il y a une parfaite continuité dans les promotions. 

Les conditions de formation militaire étaient beaucoup plus strictes, je dirais même beaucoup plus sévères, à l’époque. Il est évident que - à notre arrivée surtout et pendant les premiers mois - l’accent était mis sur cette formation militaire, sportive, physique, morale par la même occasion. Elle pesait, c’est le moins qu’on puisse dire, sur beaucoup d’élèves. A l’heure actuelle, je sais que les conditions sont allégées par rapport à cette époque. Mais, encore une fois, elles doivent être telles qu’elles permettent la formation d’un futur officier. 

Un élève : La discipline est assez difficile au début pour des jeunes comme nous, qui avons évolué depuis toujours en milieu civil. On nous dit quand on doit manger, quand on doit aller se doucher, quand on doit faire telle ou telle activité… On a l’impression d’être amputés d’une certaine forme de liberté. Mais on s’y habitue à la longue. Le cadre commun avec les élèves officiers de l’école de l’air favorise la cohésion, développe l’esprit de promotion et la transmission des différentes traditions. En tant que commissaires, nous serons amenés, tous, avec les autres élèves officiers, pilotes, mécaniciens et basiers, à travailler ensemble plus tard. Donc, on apprend déjà à se connaître. 

Commissaire général Arin : Il est essentiel, et je crois indispensable, qu’ils aient reçu une formation initiale dans les mêmes conditions que leurs camarades des autres spécialités. C’est la raison qu’il les fait admettre beaucoup plus facilement parce qu’ils ont des souvenirs commun et une formation de base commune.  

En même temps que la formation militaire a commencé la formation professionnelle, qui est évidemment un des aspects importants pour la vie future des commissaires et qui s’est passée il y a 50 ans dans des conditions difficiles.

A leur actuelle, il y a quatre commissaire instructeurs à l’école, à l’époque, il n’y en avait qu’un, qui était à la fois instructeur et directeur.

Mme Rebuffel, commissaires Mozgawa, Delprat et Grannier

Elève : La formation  Commissariat se déroule entre cours théoriques à Salon, stages sur les différentes bases aériennes et visites d’organismes qui sont en relation avec notre métier, établissement logistique, mess,... Les principales matières sont la comptabilité, l’anglais, le droit appliqué - en général en commun avec les deux autres commissariats.

Commissaire général Arin : en ce qui concerne les langues, et notamment l’anglais, qui est évidemment dans l’armée de l’air la langue primordiale, il n’y avait pas d’enseignement particulier. On ne considérait pas, alors, que l’anglais était indispensable à la formation d’un commissaire de l’air. 

Professeur d’anglais : la place de l’anglais est aujourd’hui très importante, tout simplement parce que le désir tout à fait exprimé par l'état-major c’est effectivement  de placer l’anglais au centre des préoccupations des élèves comme langue de communication et comme outil de travail chaque fois qu’ils sont en opérations  extérieures. On couvre des thèmes qui sont liés à l’international, donc les grandes institutions de défense internationales que sont l’ONU et l’OTAN, mais aussi tout ce qui relève de la construction européenne, et en particulier la construction de la défense européenne. Au-delà des cours qui sont donnés in situ à Salon, un certain nombre de voyages d’étude sont organisés pour les élèves chaque année. Un stage tout nouveau a été initié dans une université à Manchester, en Grande-Bretagne où les élèves suivent des conférences de spécialistes qui leur parlent de terrorisme, de l’histoire du renseignement ou de la prolifération, ces conférences étant données bien sûr en anglais.

Commissaire général Arin : pour l’étranger, il n’y avait pas, à l’époque, d’opérations extérieures, telles que nous les connaissons à l'heure actuelle. Ce n’est qu’à partir de 1958 et de l’indépendance des pays d’Afrique, que l’armée de l’air  a  accueilli et formé des stagiaires des armées étrangères. 

Un élève étranger : en fait, comme tous les officiers étrangers qui passent par l’ECA, les 2 années d’école vont me permettre de bien appréhender l’organisation de la défense française et les fondamentaux de la politique de la France, principal partenaire du Gabon, dans ce domaine. Ensuite, je m’initie à certaines procédures administratives, éventuellement applicables dans mon pays, en vue de maîtriser les techniques modernes d’administration et de gestion, notamment l’audit ou le contrôle gestion.

Elève : nous faisons beaucoup de sport au cours de notre scolarité, puisque nous faisons quatre heures de sport commissariat et quatre heures de sport section ce qui fait huit heures de sport dans la semaine. On a beaucoup de chance à l’école de l’air à Salon-de-Provence où nous disposons de nombreuses infrastructures : plusieurs terrains de football, un grand gymnase avec salle de musculation et sauna, une piscine et un golf. 

Commissaire général Arin : pour les conditions de vie, nous étions cinq commissaires dans une chambrée, qui n’avait pas évidemment le confort des chambres actuelles, presque individuelles. 

S’agissant du concours, nous avions des épreuves de droit privé, droit public et économie politique de six heures chacune et puis une épreuve de langue. Avec une épreuve dite scientifique, de chimie en l’occurrence, ce n’était pas notre point fort, pour des étudiants en droit qui n’avaient pas fait de chimie depuis longtemps ou n’en avaient jamais beaucoup fait.

Concernant les voyages d’étude : il faut se rappeler que, à l’époque, les premières promotions sortaient de la guerre et que nous avions tous très peu voyagé. A Salon, nous n’avons pas fait la croisière en fin de première année comme les élèves officiers et nous l’avons faite en début de deuxième année. Et comme vous le savez, en seconde année, nous étions détachés à Aix-en-Provence et, de ce fait, ce n’était plus l’école de l’air qui nous voyait partir en croisière, mais le détachement d’Aix qui partait en « voyage d’étude ». Nuance !(sourire)

Quant à la solde… il n’y en avait pas ! Nous étions assimilés à un soldat de deuxième classe et nous bénéficiions du « prêt franc » ; on vous apprendra cela peut-être dans l’historique de la solde… C’était le « prêt du soldat » que tout soldat de deuxième classe percevait quand il était appelé. Pour vous donner un ordre de grandeur, cela faisait moins de deux euros actuels par mois !  

Tout corps a une tradition. Et une tradition permet aux générations de se retrouver et de se reconnaître dans leurs anciens et dans les générations suivantes. 

Je considère que nous étions beaucoup moins bien formés, nous les premières promotions que vous ne l’êtes à l’heure actuelle. Nous avons beaucoup appris notre métier sur le tas, davantage qu’à l’école. Incontestablement, aujourd’hui, vous apprenez  les bases du métier à l’école, et je crois que vous en profitez et que vous utilisez au maximum les moyens qui vous sont donnés.

Je ne sais pas si j’ai répondu à votre attente et à vos questions. Je vous souhaite bon courage. Comme je vous l’ai dit les promotions se suivent. Il ne faut pas regarder vers le passé mais vers l’avenir. Je vous souhaite beaucoup de succès, ainsi qu’aux promotions qui vous succéderont.

Et je vous dis « à dans 50 ans ». Bon courage

Remerciements aux commissaire général (2S) Michel Vallecalle pour sa contribution archivistique.