« Fin 1992, alors que je participais à l’opération Aconit (Provide Comfort II, opération visant à protéger les populations kurdes du Nord de l’Irak), je m’interrogeais – et interrogeais également le gestionnaire (à l’époque, le commissaire-colonel Golfier, sous-directeur organisation-personnel à la direction centrale du commissariat de l’air, qui avait été mon directeur à l’école du commissariat de l’air) – sur ma future affectation.
J’étais alors dans ma troisième année à la direction du commissariat de l’air de Villacoublay, et je savais, puisque c’était alors une règle de gestion des jeunes commissaires de l’air, que je serais affecté sur base aérienne, en tant que commissaire de base, à l’issue de mon affectation.
Les bases aériennes dont le commissaire de base pouvait avoir le grade de commissaire-capitaine étaient des bases telles que Doullens, Châteaudun… Mais, au sein de la région aérienne Nord-Est se trouvaient deux formations administratives originales, assimilées à des bases aériennes, qui suscitaient mon intérêt comme future affectation. Il s’agissait des 15ème et 25ème régiments du génie de l’air (RGA), stationnés respectivement à Toul et à Compiègne.
Je ne saurais dire pourquoi cet intérêt – en raison de l’originalité de ces formations, par goût de la contradiction, autre ? –, mais il a trouvé un écho chez le gestionnaire.
Si ce dernier a répondu à mon souhait d’être affecté dans un régiment du génie de l’air, sa décision s’expliquait surtout par une récente réforme de l’administration des formations du génie de l’air, elle-même tirant les conséquences de dysfonctionnements de cette administration. Cette réforme devait se traduire par une refonte des instructions relatives au fonctionnement des unités du génie de l’air, marquée par un alignement sur l’administration de la base aérienne et, pour ce qui me concerne, l’affectation d’un commissaire de l’air au 15ème RGA.
C’est ainsi que j’ai pris mes fonctions de commissaire de base à compter du 6 septembre 1993, peu de temps avant la publication de la nouvelle instruction sur l’organisation et le fonctionnement des formations du génie de l'air (1).
Mon arrivée à la caserne Thouvenot (2), dont l’entrée était gardée par un SO-4050 Vautour, encadré de deux bulldozers, était attendue par moi et par le colonel Castela, chef de corps, et je ne saurais dire lequel des deux l’attendait le plus.
Le colonel Castela attendait certainement de moi que j’assure la bonne administration de son régiment, ou que je le rassure à ce sujet. Quant à moi, outre que je me sentais attendu par certains anciens, parmi lesquels celui qui était chef des services administratifs du régiment et qui devenait mon adjoint, j’attendais de prendre mes fonctions de commissaire du 15ème RGA avec une certaine impatience, doublée d’appréhension, en raison tant de l’originalité de cette formation militaire que de son histoire.
Originalité du régiment, puisque celui-ci était une formation de l’armée de terre (arme du génie), mise pour emploi à la disposition de l'armée de l'air, et donc composée en majeure partie de militaires de l'armée de terre, dont les fourreaux d’épaule de velours noir (pour le génie) étaient ornés de l’épervier de l’armée de l’air. Le régiment comprenait également des personnels civils et des sous-officiers de l’armée de l’air, parmi lesquels le trésorier, le chef du service de restauration-hôtellerie et l’un des deux sous-officiers du bureau gestion contrôle. Autre trait original, assimilé par l’armée de l’air à une base aérienne, le 15ème RGA constituait la BA 551.
insigne régimentaire |
En OPEX (photos AAE) |
En entrant au 15ème RGA, je ne pouvais donc que reprendre la devise de l’École de l’air (qui n’était pas encore l’École de l’air et de l’espace), « Faire face », et faire mienne celle du régiment, « Agir vite et puissamment ».
Au cours de mes trois années de commissaire de base/du régiment, les services placés sous mon autorité et moi avons été, par le soutien apporté au quotidien, étroitement associés aux différentes activités du 15ème RGA : chantiers des compagnies opérationnelles du génie de l’air (COGA) sur les bases aériennes, manœuvres à Vouziers-Séchault, détachements individuels ou collectifs en opérations extérieures, formations de spécialité des sapeurs de l’air… et, ne l’oublions pas, fêtes de Sainte-Barbe, patronne des sapeurs.
Je n’ai pu participer qu’à deux Sainte-Barbe au régiment, en 1993 et en 1995, ayant participé en 1994 à celle du détachement du 25ème RGA sur l’aéroport de Sarajevo.
Cadeau de départ, le colonel Truc, mon second chef de corps, présumant certainement ma candidature, m’a inscrit à la formation au brevet de reconnaissance de terrains sommaires (4), ordinairement délivrée aux cadres du génie de l’air, des troupes aéroportées et des fusiliers commandos de l’air. Ce fut l’occasion pour moi de découvrir en plein hiver la piste ventée et glacée d’une ancienne base aérienne. Je dois être le seul commissaire des armées à arborer l’insigne de ce brevet sur ma tenue (ci-contre).C’est donc avec une certaine tristesse que j’ai laissé mes fonctions à l’été 1996 à la commissaire, alors capitaine, Catherine Bourdès-Faury (ECA 91), tristesse néanmoins consolée, pour le Toulousain que je suis, par ma nouvelle affectation : la BA 101 de Toulouse-Francazal.
Conséquence de la professionnalisation des armées décidée par Jacques Chirac, alors Président de la République, et de la réduction du format de l’armée de l’air qui en a résulté, le 15ème RGA a été dissous le 30 juin 1998 (5). »
photos AAE |
*Aucun commissaire de l’air ne fut affecté au 25ème RGA implanté à Compiègne puis à Istres
(1) Instruction n° 1010/DEF/EMAA/BORH/LA - n° 2802/DEF/EMAT/SOUTIEN/SER/SA du 11 octobre 1993 relative à l’organisation, au fonctionnement et à l’administration générale des formations du génie de l'air, qui abrogeait l’instruction interministérielle du 25 février 1951 relative à la constitution et au fonctionnement des unités du génie de l’air et le protocole d’accord n° 1990/DEF/EMAA/1/ADM - 5713/DEF/EMAT/SOU/INT du 10 décembre 1976
(2) Le 15ème RGA était implanté dans deux quartiers jumelés, Bautzen et Thouvenot, sur la commune d’Écrouves, à proximité de Toul. Il disposait également d’un polygone d’instruction, « la sablière », situé sur la commune de Dommartin, et d’un terrain de manœuvres à Vouziers-Séchault, dans le département des Ardennes.
(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/15e_régiment_du_génie_de_l'air
(4) Cette formation est l’une des spécialités du génie de l’air, alors assurée par le 15ème RGA, aujourd’hui par le 25ème RGA.
(5)Le Génie de l'Air comprend aujourd’hui un seul régiment : le 25ème régiment du génie de l'air, formé de 5 compagnies professionnalisées stationnées à Istres (2 compagnies), Mont-de-Marsan (1 compagnie), Avord (1 compagnie) et 1 compagnie au DA136 « Colonel Phelut » de Toul/Rosières.