mercredi 5 août 2015

Du commissariat à l'UNEDIC

Il existe une "Marque commissaire"

Michel Monier (ECA 78) a mené 2 carrières successives : commissaire de l'air durant 15 années et cadre dirigeant dans diverses structures à caractère social durant 22 années.

Séquence Interview

Quels ont été vos différents postes dans le Commissariat de l’air ?

1978- 1993 : 15 belles années au sein du Commissariat de l’air.
Un parcours assez classique avec, tout d’abord, l’année de stage sur la BA 132 Colmar, puis la DCA-FATAC 1ere RA, ensuite la BA 942 de Lyon Mont Verdun en tant que commissaire de base. L’opportunité, ensuite, d’être affecté au Gabon, commissaire de la base aérienne 02- M’Vengué. L’opportunité, encore, d’avoir, au retour, une affectation à la DCCA-AG et de participer aux  premiers travaux d’évolution de la surveillance administrative vers l’audit. Nous sommes en 1989-1992. Je suis ensuite affecté à la direction des services financiers, où je resterai un an.

15 belles années, vraiment, rythmées, riches d’une suite d’expériences variées.


Dans quelles circonstances avez-vous été amené à réorienter votre carrière vers le privé, et un privé qui n’est pas celui, traditionnel, de l’entreprise ?

J’avais envisagé une orientation vers les métiers de l’audit. En fait, c’est par l’intermédiaire de Bernard Sprotti – qui avait été l’un de mes chefs à la DCCA - que s’est offerte la possibilité de la réorientation, vers la protection sociale, l’assurance chômage en l’espèce. Une réorganisation de l’Assédic de Paris – dont le directeur était alors Christian Vallet, ancien commissaire de l’air également – lui permettait de me proposer un poste d’adjoint à ses côtés sur les fonctions comptables, contentieuses. Nous sommes en 1993.

Ce n’était pas de l’audit, le milieu m’était totalement inconnu, mais la proposition de Bernard Sprotti ne pouvait pas être un « mauvais coup » ! Avec le recul de 22 années au sein de l’assurance chômage j’adresse à Bernard et Christian de profonds et amicaux remerciements de m’avoir ainsi « mis le pied à l’étrier ».

La protection sociale et l’assurance chômage  ne sont pas, effectivement, un monde professionnel a priori bien connu. C’était pour moi assez loin, pour le moins, du monde de la Défense.

La mission d’indemnisation du chômage ne fonctionne, cependant, que si elle est gérée, administrée et les fondamentaux sont, dans ces domaines, les mêmes. L’apprentissage au sein du commissariat a trouvé là une passerelle.
Je précise que, ayant  envisagé cette réorientation, j’avais suivi le cursus IAE (option audit) lors de mon affectation à la DCCA. Anticipant une réorientation professionnelle, cette formation permettait une mise à niveau, une découverte aussi, dans le domaine général de l’administration des entreprises.

Quelles fonctions avez-vous exercées ensuite dans ce secteur ?

Intégrant l’Assédic de Paris, je me suis tout de suite demandé, ayant été habitué à la mobilité professionnelle et géographique comment je pourrai « bouger », ou « sortir », de cette organisation qui, après l’Armée de l’air me paraissait « limitée » avec ses 700 collaborateurs.

Je ne savais pas encore que l’Assurance chômage bougeait, devait bouger et aussi se réinventer…

Nommé directeur adjoint de cette Assédic, j’ai ensuite rejoint le siège, l’Unédic, comme adjoint au directeur du réseau.  Puis j’ai été nommé directeur régional de Bourgogne – avec l’objectif de préparer la fusion de cette Assédic avec celles de Franche-Comté et de Belfort. La règle de gestion ayant été que les directeurs en place ne pouvaient être nommés directeur de l’Assédic issue de la fusion, je « remonte à Paris »  en tant que directeur du Groupement des Assédic de la région parisienne – un organisme alors unique au sein de l’organisation de l’assurance chômage, dont la mission était le recouvrement des contributions pour la région Ile de France, soit un tiers de la ressource totale.

Une réorganisation de l’Unédic, en 2003, fait créer une direction générale « contrôle » qui trouve sa place entre la direction « réseau » et la direction « technique ». Le DG de l’époque me propose de créer cette 3ème DGA…ça y est…je vais faire de l’audit, mais pas seulement.

Depuis 2003, le périmètre de cette DGA a, assez régulièrement, évolué. Lors de la création de Pôle emploi, opérateur auquel l’Unédic délègue les activités opérationnelles  de l’indemnisation (le recouvrement est à l’ACOSS), j’ai opté pour rester à l’Unédic.
Après avoir contribué aux travaux de préfiguration de Pôle emploi, il s’est agi de « réinventer » l’Unédic dont la mission a été recentrée sur la prescription des règles de l’indemnisation, leur financement et le contrôle de leur mise en œuvre par les opérateurs,  Pôle emploi et l’ACOSS.

Je continue à piloter l’audit, mais l’audit par l’Unédic de ses opérateurs ; la fonction recouvre, outre le contrôle et l’audit, la coopération avec ces opérateurs et la relation  avec les administrations centrales de la sphère Emploi et les divers organismes de protection sociale.

Tant professionnellement que géographiquement, l’assurance chômage m’a permis de continuer à bouger.

 Un mot encore pour signaler que l’installation d’une commission d’audit  a été l’opportunité de solliciter, pour y siéger en tant que personne qualifiée, un ex-commissaire de l’air, aujourd’hui conseiller maître à la Cour des comptes, et de solliciter aussi, presque par hasard, un ancien de Arthur Andersen qui était intervenu dans les toutes premières formations des commissaires de l’air à l’audit.

Que vous ont apporté votre formation à l'ECA et votre expérience dans le Commissariat de l’air  pour l'exercice de vos fonctions dans ce nouveau monde ?

La pluridisciplinarité de notre formation avec l’insertion de « stages » complémentaires aux cours, si elle est maintenant banale, est un "plus" évident. Cette formation, puis la possibilité d’alterner des métiers différents nous donnent une employabilité évidemment transposable dans des milieux très diversifiés.

Les exemples sont nombreux de ceux d’entre nous qui réussissent « ailleurs » et y apportent.

Avoir été un administratif, ou un administrateur, au sein d’une organisation opérationnelle donne une orientation « résultat » qui constitue, également, un avantage avéré.

Bien sûr, d’autres parcours peuvent donner les mêmes acquis mais, pour avoir échangé avec quelques ex-commissaires, nous partageons que la formation à l’ECA puis l’expérience – les expériences- qu’offre le Commissariat, ont grandement facilité, voire permis, nos réorientations alors même que nous sommes dans des environnements très différents aujourd’hui. Il existerait donc une « marque Commissaire ».

S’il faut un mot pour résumer l’apport, je retiens celui de  « responsabilité ». Parce que l’on passe vite dans des affectations différentes, sur des activités variées, il faut en être responsable rapidement et laisser une situation nette.

C’est peut-être là l’apport majeur que j’ai retiré de mes années de Commissaire de l’air.

A l'inverse, que vous a apporté « de plus » ou de « différent » cette seconde expérience professionnelle ?

Forcément, il y a du plus, et il y a du différent. Du très différent. Le plus différent, c’est le mode de la prise décision, dans les domaines quotidiens de la « gestion » et dans celui de la décision « politique ».

On ne prend pas de décision : on crée les conditions pour que les décisions soient prises. Si la décision n’est pas prise, c’est qu’on a échoué à créer le consensus. Créer les conditions, c’est gérer le calendrier.

Dans un organisme à gestion paritaire, le cœur de métier est certainement là : créer le consensus, gérer les équilibres. Ce n’est pas rester figé, c’est participer à créer les conditions de l’évolution.

L’indemnisation du chômage est  un objet du débat public. Il faut nourrir ce débat, en juste équilibre.


Quels conseils donneriez-vous à un commissaire des armées d’ancrage air qui souhaiterait réorienter sa carrière professionnelle ?

Conseiller est difficile, particulièrement en ce domaine, quand il s’agit de choix de cet ordre-là.

Le souhait de réorienter sa carrière se confronte aux opportunités, alors si j’ose un « conseil » c’est celui que nous donne Pittacos de Mytilène : savoir reconnaître "l’occasion favorable".
Et, l’occasion favorable, c’est un arbitrage entre le "métier" et "l’environnement", joindre les deux est, à l’évidence possible, mais il faut être prêt à arbitrer entre l’un et l’autre.

Je crois qu’il ne faut surtout pas courir après ce que l’on aurait voulu faire, ou voulu être ; mais, tout simplement, s’engager totalement dans ce que l’on veut faire.

Les exemples sont assez nombreux de réorientations diverses et réussies, et  ceux qui ont fait le pas sont, certainement, disponibles pour rencontrer ceux qui pensent faire ce pas.

L’AMICAA, le réseau du SCA et la communauté des commissaires permettent et facilitent ce lien et « l’ancrage air » nous fait un amical devoir d’être disponibles.

Un autre « conseil », peut être aussi : ne pas faire savoir "qu’on envisage" mais faire savoir "que l’on est prêt" pour aller vers autre chose.