samedi 1 mars 2014

Commissaire de l’air et bénévole associatif

Les bénévoles font partie d’une « race » particulière

par le commissaire général (2S) Pierre Ducassé (ECA 62)

Ancien directeur central du commissariat de l’air (1992-1995), le commissaire général Ducassé a mené 2 « carrières », à la fois en parallèle et successives : commissaire de l’air durant 33 années et pratiquant en club sportif et artistique (CSA) puis président de la FCSAD (aujourd’hui Fédération des clubs de la défense).
Interview

Mon général, pouvez-vous d’abord nous détailler ces deux volets de vos activités ?
En réalité, j’ai l’impression d’avoir mené plus de deux carrières ! On pourrait rajouter celle d’un adjoint « Finances » au  maire d’une petite ville de 10 000 habitants, ou celle d’un militant anti-éolien « historique », mais ceci serait une autre histoire … revenons à celles que vous avez citées.
J’ai été commissaire de l’air en activité pendant 33 ans et, de ma première affectation de chef de bureau à la Sous-direction en Allemagne jusqu’à mes dernières responsabilités  de Directeur central, en passant par une bonne dizaine d’autres postes, je ne me suis jamais ennuyé et je n’ai jamais regretté d’avoir embrassé cette carrière, bien au contraire.

Parallèlement, comme vous l’avez dit, j’ai pratiqué assidûment plusieurs activités, notamment sportives, au sein de différents clubs de la Défense, et j’ai été mordu par le virus du dirigeant bénévole lorsque j’ai créé le CSA de la base aérienne de Saint-Dizier. A l’ASCAIR, après plusieurs années comme responsable de la section football, j’ai eu le redoutable honneur de succéder au commissaire général Louet pour assumer la présidence de ce grand club et de l’organisation des 20km de Paris*. Entré au Comité directeur de la FCSAD en 1988, j’en ai été élu Président en 1992 et le suis resté jusqu’en 2000, soit 5 ans après mon admission en 2e section. J’ai donc été amené à cumuler cette présidence avec mes responsabilités de directeur central du commissariat de l’air pendant 3 ans.

Vous me demandez de détailler ces deux volets de mes activités. C’est évidemment impossible dans le cadre de cette interview ! Mais je peux vous dire qu’il n’y a jamais eu incompatibilité ni opposition entre les deux. Bien sûr, avant d’accepter la présidence de la fédération, j’avais sollicité l’accord du chef d’état-major de l’armée de l’air, qui m’a encouragé dans cette voie et m’a remercié plus tard d’avoir participé au rayonnement de notre armée !

Bien des années plus tard, en 2011, le CEMAA qui représentait le ministre au congrès de la fédération, a eu la gentillesse d’évoquer officiellement mes deux activités et de m’en remercier. Je dois avouer que j’y ai été très sensible (les anciens sont très émotifs !).

Votre pratique sportive - et plus généralement bénévole - a-t-elle enrichi votre expérience professionnelle ?
Bien sûr. Entre autres lieux communs, les journalistes sportifs disent du sport qu’il est une école de la vie… Je dirais plutôt que la pratique d’un sport collectif est une bonne préparation à la vie professionnelle et que la promiscuité d’un vestiaire est parfois plus instructive que les bancs de l’école !
L’expérience d’un dirigeant bénévole est également une bonne formation. Les bénévoles font partie d’une « race » particulière que j’ai souvent rapprochée de la « race » des officiers : ils sont prêts à tout donner (quand on n’a pas tout donné …), mais ils exigent de recevoir en retour une certaine reconnaissance. N’est-ce pas naturel ?
Bref, pour répondre plus directement à votre question, la vie associative permet de mieux connaître l’autre, prépare au travail en équipe, sublime sa propre action et amène … à ne pas se faire trop d’illusions sur la nature humaine ! N’y a-t-il pas là un cocktail harmonieux pour maîtriser sa vie professionnelle ?

Vous avez été président de la FCSAD durant 8 années, et vous avez d’ailleurs été à l’origine de l’évolution statutaire entre l’ancienne Union fédérale et une structure fédérale classique. Quelle part de l’expérience du commissaire de l’air que vous étiez avez-vous réinjectée dans cette nouvelle fonction de dirigeant ?
Ma formation de commissaire de l’air a été primordiale dans cette période que vous évoquez, le passage de l’ancienne Union fédérale qui, comme son nom l’indique, était une simple union informelle basée uniquement sur la volonté de ses dirigeants, à une véritable fédération. Il s’agissait de mettre en conformité la situation très particulière de notre mouvement (immersion dans le monde de la Défense, associations à la fois sportives et culturelles, cas spécifiques des clubs de la Marine…) avec des statuts-types prévus par une loi consacrée exclusivement aux fédérations sportives. Il fallait faire approuver ces nouveaux statuts par le ministère de la jeunesse et des sports mais aussi par le ministère de la défense et par le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF).
La journée la plus émouvante pour moi a été celle du 12 mai 1992, où j’ai été amené à défendre devant l’assemblée générale du CNOSF la candidature de notre toute nouvelle fédération. Le regretté Président Nelson Pailloux a prononcé, ce jour-là, des mots très élogieux à l’égard de nos clubs et à l’égard du monde militaire en général.
Ce sont là des moments qui comptent parce qu’ils justifient une action et un engagement personnels.

A cette fonction, le fait d’être commissaire et non officier des armes a-t-il posé problème, en interne ministère ou vis-à-vis de l’extérieur ?
Pas du tout. D’ailleurs mes prédécesseurs étaient un administrateur civil de la défense et un ingénieur général de l’armement et mon successeur fut, de nouveau, un administrateur civil, avant que ne soit élu, enfin (!), un général de l’armée de terre. Et j’espère bien que le prochain sera de nouveau un commissaire de l’air … pardon, un commissaire des armées !

Au sein du ministère, qu’apporte la fédération et ses clubs à l’institution et à ses membres, militaires, civils et leurs familles ?
Je pense que tous ceux qui ont pratiqué un club de la défense savent ce que ce club apporte à la communauté, non seulement en termes d’organisation des loisirs, mais aussi pour l’esprit de corps, le lien Armée-Nation et le soutien social. Sur ce dernier point, l’existence d’un club est devenue essentielle pour le soutien du moral des familles en période d’opérations extérieures.
Pour ce qui concerne la fédération, en dehors du support administratif des clubs (assurances, aide juridique, organisation de manifestations sportives et  culturelles, formation des cadres …), je retiendrai essentiellement le lien permanent entretenu par la fédération avec  le mouvement olympique et sportif national et, surtout, avec les plus hautes instances du milieu de la défense. J’ai souvent observé avec amusement l’étonnement des nouveaux ministres de la défense découvrant l’importance du mouvement fédéral et la présence, à sa tête, d’un président élu !

Quel conseil donneriez-vous à un jeune commissaire des armées, quel que soit son ancrage, par rapport à une pratique sportive ou un engagement bénévole dans un club de la Fédération ?
Je me garderai bien de donner un quelconque conseil. Simplement, qu’il (ou elle) agisse selon ses aspirations, selon son cœur. Mais, attention : quand on met le doigt dans l’engrenage du bénévolat …     
*Voir nos 2 articles