mardi 11 juin 2013

L'Académie française et les aviateurs

Par Michel Barbaux (72)

   La noble Institution, gardienne de la langue française, créée par Richelieu en 1635, a su déceler les talents littéraires de quelques-uns de nos aviateurs auxquels elle a décerné de prestigieuses distinctions.
 
(photo : John Phillips)
 Il en est ainsi d’Antoine de SAINT-EXUPÉRY qui aura très tôt mêlé ses deux vocations, partagé entre sa passion du vol et son goût de l’écriture. La seconde guerre mondiale consacrera son talent d’écrivain avec, notamment, Pilote de guerre et Le petit prince. Décédé prématurément, à 44 ans, il n’a pu se présenter à l’Académie française mais celle-ci lui avait décerné dès 1939 son grand Prix du roman pour Terre des hommes.






Jules Roy 1988



Jules ROY, qui a fait carrière dans l’armée de l’air, a lui aussi été distingué par l’Académie qui lui a accordé son grand Prix de littérature en 1958. Ayant combattu valeureusement au sein de l’armée française de la Libération, il racontera cet épisode de sa vie dans La vallée heureuse, l’un des écrits les plus poignants sur la condition militaire et la servitude de l’aviateur. Candidat à l’Académie française en 1970, c’est Eugène Ionesco qui est élu par 18 voix contre 8.





Romain Gary
Un autre aviateur héroïque de la Seconde Guerre mondiale, Romain GARY, devenu écrivain et diplomate, lauréat du Prix Goncourt en 1956 pour Les racines du ciel, aurait pu tenter avec quelque chance de succès de franchir le seuil de l’Académie. Mais il ne s’y est pas présenté, malgré la suggestion que lui en avait faite Maurice Schumann, lui-même académicien élu en 1980, selon des propos rapportés par Dominique Bona, récemment élue.
 

Malraux en Espagne
Ne s’est pas non plus porté candidat André MALRAUX, aviateur-navigateur en Espagne en 1936 aux côtés des républicains espagnols, privant ainsi la Compagnie, qui l’aurait probablement élu, d’un écrivain de grande renommée.










Joseph Kessel
C’est en 1962 que l’Académie française accueille le premier aviateur, et jusqu’à présent le seul, en la personne de Joseph KESSEL, élu face à Marcel BRION par 14 voix contre 10. Kessel, qui a combattu dans l’aviation pendant les deux  guerres mondiales, s’inscrit dans la même veine littéraire que SAINT-EXUPÉRY en participant à son tour à la construction mythique d’un pilote élevé au rang de héros. Dès 1926, âgé de 28 ans, ce grand ami de MERMOZ s’était vu décerner le grand Prix du roman de l’Académie pour Les captifs.
 

Marc Fumaroli
Aujourd’hui, l’Académie française compte dans ses rangs deux sympathisants de l’armée de l’air. L’un est Marc FUMAROLI, brillant spécialiste de la rhétorique et de la conversation, élu en 1995, nommé colonel de la réserve citoyenne en 2004.



Frédéric Vitoux
L’autre est Frédéric VITOUX, romancier et critique littéraire, élu en 2001, qui m’écrivit ces lignes : « Pour un peu j’aurais pu être des vôtres. Mon père rêvait de me voir rejoindre l’école navale. Je lui avais dit que je préférais l’armée de l’air et Salon de Provence. Mais cette année-là, j’échouais au bac et tout était remis en question ! L’année suivante, bac enfin réussi, j’optais plutôt pour des études littéraires ».